Danser l'écriture, écrire la danse

(ou la danse vivante, intelligente, libre)

Certaines aventures artistiques permettent d’expérimenter une danse peu normative, qui résiste à tous les interdits. Elles sont initiées dans les années trente, se renforcent pendant la Seconde Guerre mondiale, et perdurent au-delà. Elles fleurissent tant aux États-Unis qu’en Europe, y compris en Suisse. Elles débouchent graduellement sur l’affirmation d’une danse moderne puis contemporaine qui, petit à petit, prend une place de choix dans le paysage culturel. Pour certains, la danse moderne puis contemporaine adopte des formes diverses : thérapeutiques, éducatives, expressives ou spectaculaires. Pour d’autres au contraire, l’expérience de la danse n’a pas à être cataloguée. C’est sa dimension artistique qu’il faut retenir, qui peut être accessible tant par la transmission, l’expérimentation, la performance (au sens d’acte, de mise à l’épreuve), la retranscription (par les mots, la notation, le dessin). En somme, dans de tels cas, il n’y a plus non plus de séparation entre la danse et l’écriture : toutes les deux appartiennent à un seul et même geste créatif. En outre, la danse contemporaine consiste aussi en une exploration systématique et analytique du mouvement. À ce titre, elle n’est pas plus extérieure à l’écriture que l’écriture lui est antinomique. Par ailleurs, elle trouve son écho dans d’autres explorations artistiques. En somme, la danse devient effectivement autonome mais sans être close sur elle-même  ; elle se définit comme une discipline artistique mais se construit en dialogue avec la redéfinition d’autres disciplines. Parfois, elle se fait poème, tandis que l’écriture poétique se fait danse.