La liste d’invités trouvée à Genève est une source très intéressante. Elle témoigne de la tradition du bal bourgeois, qui, malgré toutes les interdictions de danser de Suisse romande, semble avoir été très vivante entre le XIXe et la première moitié du XXe siècle. D’autres sources renseignent elles aussi le bal bourgeois. Dans Pipes de terre, pipes de porcelaine de Madeleine Lamouillle par exemple, une description confirme que les bals bourgeois étaient certes réservés à une élite, mais pouvaient réunir un très large public. Selon l'auteur, ses maîtres d’origine aristocratique « […] donnaient deux-trois bals par an, où était invitée toute la haute société de Lausanne, du canton de Vaud, de Genève : ça faisait des bals de 250 personnes. F., le fleuriste de Genève, venait faire la décoration. Il y avait pourtant deux jardiniers à Valeyres ; on avait toutes les plantes, y compris les plantes de serre : des cyclamens, des primevères, des plantes vertes. Mais c’est F. qui apportait ses fleurs, qui venait décorer le Manoir. La pâtisserie venait par camionnette de la ville. Ces dames faisaient faire leurs robes chez les grands couturiers de Genève ou de Paris. Les modistes venaient exprès de Genève, en voiture, pour proposer leurs chapeaux, faire les essayages. »
Madeleine Lamouillle, Pipes de terre, pipes de porceleine, Genève, Zoé, 1978, p. 73—74.
Les ordonnances somptuaires réglant les dépenses des citoyens romands et veillant à limiter leurs excès, au profit de l’État, n’ont donc pas toujours raison de leur sens de la fête.
Néanmoins il semble que ce soit ceux de plus humble condition qui soient les plus touchés, puisque ce sont les lieux publics, où l’on boit et où l’on danse, qui sont les plus réglementés.